Tac, tac, tac… Ça taille dans les vignes !

Après avoir laissé leurs terres se reposer à la suite des vendanges, avoir procédé à un léger labour et d’éventuelles corrections de l’équilibre du sol, les vignerons s’activent en ce moment à tailler la vigne. N’allez pas croire que ce repos végétatif en hiver est signe d’inactivité, en réalité les vignerons sont occupés tous les mois de l’année ! Il faut savoir qu’abandonnée à elle-même, la vigne est une plante très vigoureuse qui a tendance à se développer considérablement.

Sans taille, elle s’allonge et se ramifie; la production de bois l’emporte alors sur la fructification. La taille est donc nécessaire à une production de vin de qualité.

Mais savez-vous quel est son intérêt, son origine, quelques principes à respecter et les différents types de taille ? Saviez-vous que ces règles de taille étaient notifiées dans le cahier des charges de l’appellation ?


La taille de la vigne va avoir trois grands objectifs :

  • Former la souche. C’est-à-dire lutter contre son développement en longueur provoquant un allongement exagéré des rameaux de la vigne. En terme technique, on parle de lutte contre l’acrotonie;
  • Régulariser le nombre et le volume des futures grappes de raisin pour avoir une récolte et une maturation correcte;
  • Limiter le nombre de bourgeons pour adapter la vigne aux possibilités du milieu pour avoir une vigueur convenable et assurer la pérennité de la vigne. Une taille excessive épuise la vigne.

Le mode de taille de la vigne influe sur la qualité des raisins et donc sur celle du vin : c’est une étape primordiale de la culture de la vigne qui est d’ailleurs clairement imposé par le cahier des charges de l’appellation.

A quelle période faut-il tailler ?

On pourrait en principe commencer à tailler dès que la vigne a perdu ses feuilles. Cependant, les vignerons qui taillent tôt (en novembre par exemple) peuvent s’exposer à des risques de gelée. En effet, plus la vigne est taillée tôt et plus son cycle végétatif – qui commence au printemps par l’éclosion des bourgeons – sera précoce.

Or, les jeunes pousses (pampres) des futurs sarments portent les ébauches des futures grappes de raisins. Ces ébauches tout comme le reste de ces pampres sont très sensibles aux gelées de Printemps qui peuvent annihiler la future récolte. Ces gelées étant plus fréquentes au début du Printemps, il est donc prépondérant de retarder la taille au maximum pour les parcelles soumises à un risque de gelée. Les bourgeons écloront plus tard lorsque les températures plus chaudes limiteront le risque de gelée.

A l’opposé, tailler la vigne alors que certains bourgeons ont déjà éclos n’est pas forcément une bonne idée. On aura dans ce cas une perte de rendement et une diminution de la production de bois car une partie de la sève montante qui amène l’énergie pour que les bourgeons sortent sera perdu dans la partie des sarments que l’on enlève lors de la taille.

Pour l’appellation Rasteau, le cahier des charges indique que la taille doit être achevée au 15 avril au plus tard.

Petit dicton : « Taille tôt, taille tard, rien ne vaut la taille de mars ! »

Avec quels outils ?

Traditionnellement, il était coutume de tailler avec des sécateurs mécaniques à une main ou à deux mains.

Aujourd’hui, des sécateurs plus modernes dits électriques avec une batterie portable permettent de limiter la pénibilité du geste (et soulage surtout le dos de celui qui taille !), de tailler à une main et surtout d’aller plus vite. L’autre main laissée libre peut tenir les sarments lors de la taille et les tirer ensuite. L’entretien de l’outil est important et il est parfois nécessaire d’aiguiser la lame plusieurs fois par jour. Tous les jours il faut lubrifier l’articulation du sécateur.

Et quels types de taille ?

Là encore, il n’y a  pas d’improvisation, le cahier des charges notifie que « les vignes sont taillées avec un maximum de 6 coursons par pied. Chaque courson porte un maximum de 2 yeux francs. Pour les vins tranquilles, la Syrah par exemple pour les vignes âgées de plus de 20 ans (21ème feuille), peut être taillé en taille Guyot simple avec un maximum de 8 yeux francs sur le long bois et un courson à 2 yeux francs maximum ».

À Rasteau, 2 types de taille sont donc de coutume :

  • La taille en Gobelet ancestrale :

C’est une taille courte amenée par les romains. Elle est caractérisée par un tronc plus ou moins haut et des bras en cornes (vieux bois) terminés par un ou deux coursons (bois de l’année dernière et qui correspondent aux sarments à tailler) portant chacun deux ou trois bourgeons.

Avantages : cette forme de conduite ne nécessite pas la mise en place de fils de palissage. Elle permet une bonne résistance au vent et à la sécheresse. Les raisins sont près du sol ce qui assure une maturité un peu plus précoce.

Inconvénients : cette forme de conduite est mal adaptée à la mécanisation (vendange mécanique, écimage et rognage du feuillage,…).

On peut voir (illustration ci-dessous) que le cep ressemble à une main ouverte. Le tronc porte plusieurs bras. Par cette taille, la végétation forme un parasol qui protège les grappes du soleil. La taille en Gobelet est utilisée à Rasteau pour le Grenache, le Mourvèdre, le Carignan et le Cinsault.

  • Le cordon de Royat :

C’est une taille courte. Elle est caractérisée par un tronc vertical qui soutient une ou deux charpentes horizontales portant des coursons à un ou deux bourgeons chacun.

Avantages : c’est le système de taille le plus adapté à la mécanisation (vendange mécanique, rognage écimage, pré-taillage,…). La maturité est homogène car les raisins se retrouvent au même niveau avec une exposition souvent identique.

Inconvénients : obligation de palisser le vignoble. Formation délicate.

Comme le montre très bien l’illustration ci-dessous, les bras horizontaux situés de part et d’autre du pied sont soutenus par un fil de fer. Elle est surtout utilisée pour la Syrah, mais elle peut être utilisée pour tous les cépages de l’A.O.C. Rasteau.

 

Si vous arpentez le sentier viticole de Rasteau, vous pourrez retrouver ces précisions au panneau n°4 !

Pour aller encore plus loin …

Au mois de Mars et juste avant le printemps, les travaux dans les vignes continuent avec le labour, c’est le moment idéal avant que la vigne et la nature ne se réveille.

Puis au mois d’Avril, c’est le temps pour planter et palisser : les sarments sont devenus mous et doivent donc être aidés dans leur croissance. C’est à ce moment-là que les vignerons les attachent sur des rangés de fil de fer.

Nous vous en dirons plus dans les quelques mois, d’autres articles sur les travaux des vignes sont à venir !


Sources : www.covigneron.com / le blog des vins du Languedoc Roussillon


Par EMILIE RACHENNE